CLUB D'ASTRONOMIE DE TOUSSAINT

J’ai loué l’eVscope 2 pendant deux mois!

L’été dernier (2022) j’ai voulu essayer l’eVscope 2 de chez Unistellar.
Comme la Normandie n’est pas une région réputée pour son ensoleillement, j’ai décidé de le louer pendant deux mois pour être sûr de l’utiliser quelques soirées entre les nuages! Ça m’a couté un bras (l’équivalent d’une bonne lunette APO) mais pas autant que si je l’avais acheté (4500€ sans le sac de transport qui coute 200€ de plus!).

Mes photos :

Je vous invite à voir une sélection de mes photos prises avec l'eVscope compilées dans 3 vidéos :

• les nébuleuses
• les amas d’étoiles
• les galaxies

Je débute l'astrophotographie!

Même si je connais bien le ciel depuis mon enfance, les constellations, la mécanique céleste, la localisation des principaux objets du Ciel profond que j’ai vu jusqu’à présent uniquement sur photos dans des livres ou sur Internet, je me considère comme un astronome amateur débutant car je n’avais pas eu la chance jusqu’ici d’observer le ciel profond au télescope et encore moins de le photographier.
Depuis maintenant plus d'un an j'observe le ciel avec une lunette 150/900 et j'apprends à photographier le ciel avec mon APN et une monture de suivi mécanique.

C’est donc comme débutant éclairé que je vous donne mon avis sur l’eVscope.

L'eVscope, c'est quoi?

L’eVscope 2 est un télescope (réflecteur de 114mm de diamètre pour 450mm de focale) qui ne semble pas spécialement performant au vu de son prix (4700€ avec trepied et sac de transport).
Mais c’est sa partie électronique intégrée qui le rend si singulier. Il embarque une caméra, une monture de suivi automatisée et un véritable ordinateur de bord lui permettant de se géolocaliser automatiquement (via un smartphone), de suivre les objets, de prendre une série de photos, de les empiler en temps réel et de les envoyer par wifi vers un smartphone ou une tablette à proximité, tout cela sans aucun câble et aucun élément supplémentaire à brancher. Il intègre également une batterie rechargeable qui peut durer largement une ou plusieurs soirées d’observation et une prise USB pour recharger son smartphone.

Je dois dire que j’ai été impressionné par la vitesse et la simplicité de la prise en main et de la mise en fonction. Il suffit de l’installer dans son jardin sur son trépied bien à niveau, sous un ciel étoilé, de connecter son smartphone à l’appareil via son wifi, (c’est le GPS du smartphone qui lui enverra les données de géolocalisation et de date, ce dernier est donc absolument indispensable et il vaut mieux également avoir du réseau), de faire la mise au point manuellement via l’oculaire (un masque de Bahtinov est fourni), avant de lui demander de se mettre en station automatiquement.

L’eVscope va alors scruter le ciel et va pouvoir se géolocaliser en comparent ce qu’il voit avec son atlas intégré.

Une fois la géolocalisation effectuée, on peut lui demander de pointer n’importe quel objet répertorié dans sa base de données (évidemment, l’objet doit être réellement accessible visuellement). Il va alors pointer automatiquement l’objet et une fois la cible verrouillée, on peut lui demander de commencer un empilement d’images dont le résultat apparaitra progressivement sur le smartphone, il suffit de quelques minutes pour avoir une image plus que correcte, on décide soi même de stopper l’empilement lorsqu’on est satisfait du résultat, une photo sera alors automatiquement envoyée au smartphone. 

Lorsque tout marche bien (je vais y revenir) l’eVscope peut être opérationnel en 5mn montre en main entre le moment ou on le sort dans son jardin et le début de l’empilement d’une cible.

Ce que je pense de l’eVscope 2

Les points positifs :

• Pour un débutant comme moi qui n’avait jamais fait de photo du ciel profond, l’expérience a été impressionnante, j’ai pu prendre en photo une cinquantaine d’objets du ciel profond (la moitié du catalogue Messier!) en une dizaine de soirées d’observation seulement, sans aucune connaissance particulière, sans mise en station laborieuse, sans brancher un seul câble (à part pour recharger l’appareil!).
• Le temps d’acquisition est très rapide et je pouvais photographier jusqu’à dix objets en une seule soirée.
• L’eVscope est capable de fonctionner même avec un ciel moyen, avec des nuages passagers, une légère brume ou une grosse pollution lumineuse, ou même un soir de pleine lune et comme la mise en station est extrêmement simple et rapide et qu’il est en plus très léger (9kg avec trépied), il m’est arrivé de le sortir pour seulement un quart d’heure entre deux nuages et réussir à faire tout de même une ou deux photos!
• On peut l’utiliser même en agglomération et voir des objets du ciel profond en quelques minutes, certains même le customisent en rajoutant des filtres sur le miroir secondaire (mais ce n’est pas vraiment prévu par le constructeur).
• L’appareil est extrêmement compact très transportable et totalement autonome (à part la nécessité d’avoir un smartphone).
• Je l’ai pas mal trimballé en voiture à travers toute la France et je n’ai jamais eu de problème de collimation, on peut lui demander de faire automatiquement une calibration via l’application smartphone.
• Le wifi de l’appareil et l’application gratuite permet l’observation simultanée sur plusieurs smartphones, ce qui permet de rendre ses soirées d’observation très conviviales, chaque utilisateur connecté pourra sauvegarder sur son smartphone les photos qu’il souhaite. 

Les points négatifs :

• La géolocalisation se passent bien la plupart du temps, mais il lui arrive parfois de ne pas y parvenir, dans ce cas, il n’y a pas beaucoup de solutions à part insister, ça peut marcher du premier coup comme ça peut coincer pendant 20mn ou plus, il est même arrivé que ça ne fonctionne pas du tout de la soirée sans que je comprenne pourquoi. Il lui arrive également de refuser d'empiler au delà de quelques minutes (pourtant en théorie il n'y a pas de limite de temps) et là encore, difficile de remédier à ce genre de problème car très peu de réglages sont accessibles.
• Vu son diamètre et sa focale, il est très mauvais en planétaire (y compris pour la lune) et son électronique hi-tech n’y peut pas grand chose. Même si Unistellar essaie d’y remédier via les mises à jour logicielle, il n’est absolument pas fait pour cela!
• La qualité des photos, bien que surprenante au début par la rapidité d’acquisition, reste très moyenne, on est plus dans du visuel assisté que dans l’astrophoto, le piqué des photos est médiocre et malheureusement la qualité du ciel aura moins d’impact sur le résultat qu’avec du matériel plus classique. Idem pour le temps de pose, on a l’impression qu’au delà de 10 ou 15mn d’acquisition le gain de qualité n’augmente pas tant que ça et même si certains utilisateurs restent plusieurs heures sur une cible, je ne suis pas bluffé par le gain de qualité en fonction du temps de pose.
• Toutes les photos faites avec cet appareil se ressemblent, même focale, même couleurs, qualité similaire malgré des conditions géographiques ou météo qui peuvent être très différentes, bref, je pense qu’une fois l’année passée et les objets des diverses saisons photographiés, la marge de progrès est faible avec cet appareil et on risque de faire rapidement le tour de ses possibilités.
• Ses possibilités d’évolution sont très réduites, on ne pourra pas changer de caméra, d’oculaire ou augmenter la précision du suivi, il n’y a que le logiciel qui peut évoluer.
• Au sujet de l’Application smartphone je là trouve très peu intuitive même si on finit par comprendre comment ça marche. Les mises à jour amélioreront peut-être l’interface utilisateur.
• Au moment ou je l’ai utilisé (été 2022), les images envoyées au smartphone n’étaient pas en RAW et donc la marge pour les améliorer avec un logiciel de retouche photo est mince. On pouvait malgré tout récupérer les RAW mais pour cela il fallait téléverser la mémoire de l’appareil sur les serveurs du constructeur après la session d’observation via votre wifi domestique et ensuite demander à Unistellar de vous renvoyer les RAW, bref un peu compliqué, mais tout cela évoluera peut-être, je l’espère!
• L’utilisation en visuel directe est impossible avec cet appareil car même si la version 2 de l’eVscope possède un oculaire, c’est un petit écran LCD qui se trouve derrière.
• Enfin, si l’on regarde son prix, on se dit que pour 4700€ on peut se payer un sacré kit pour l’astrophoto, alors c’est sûr, il faudra passer beaucoup plus de temps d’apprentissage pour configurer et choisir les nombreux éléments qui vont interagir : la monture motorisée, la mise en station, la caméra, le suivi, les batteries, l’ordinateur (ou ASIAIR), les câbles, mais au final, pour beaucoup moins cher, on obtiendra des images d’une bien meilleure qualité, et l’on pourra faire évoluer son matériel tout en revendant certains éléments.

Conclusion :

Je suis content d’avoir pu m’initier avec cet instrument qui m’a fait faire en peu de temps un grand bon dans la découverte et la connaissance du ciel profond et tout cela avec une facilité déconcertante. Mais une fois acheté on ne pourra pas faire évoluer sa configuration et l’appareil risque de devenir rapidement obsolète avec la sortie de nouveaux produits. Au fil du temps, même avec une meilleure expérience utilisateur et de meilleures conditions d’observations, la qualité des photos obtenues n’augmentera pas considérablement car les réglages de l’appareil sont limités.
Tout cela me conforte dans l’idée que ce n’est pas un produit que j’achèterai vu son prix, même si je conseillerais sa location aux débutants qui veulent découvrir le ciel profond sans se casser la tête. Il peut séduire également des passionnés qui veulent pouvoir dégainer un appareil rapidement sans aucune contrainte de configuration.
En voyage, l’appareil permet en quelques minutes d’obtenir un résultat plus que correct en le partageant facilement avec son entourage via le wifi.

Pour louer l’eVscope :

https://exop.shop/produit/location-telescope-evscope2-avec-sac-de-transport/

Gilles Réa